J'te raconte pas (les mots ont-ils encore un sens ?)
Détournement du vocabulaire, emploi d’un terme à la place d’un autre, abus de l’antiphrase, formules creuses resservies jusqu’à plus soif : la maljactance se porte bien ces temps-ci. Et ce n’est pas l’écrit qui rachètera l’oral, entre SMS sans sujet ni verbe et e-mails sans queue ni tête.
A ces dérives, certains n’ont rien de mieux à opposer que la sempiternelle défense d’une langue française mythique, sacrée, immuable.
Or le français, comme toute langue vivante, n’a cessé de se transformer depuis ses origines ; et son évolution n’a aucune raison de s’arrêter aujourd’hui. Pas plus que l’histoire des hommes, dont elle est le reflet.
La grande misère du langage actuel est un sous-produit de notre époque, marquée par le règne du dieu-argent et le triomphe de l’idéologie néo-libérale.
Depuis qu’il existe, le langage a toujours eu deux fonctions contradictoires : transmettre de l’information à certains, et du mensonge au reste du monde. En ce début de nouveau millénaire, la deuxième de ces fonctions finira-t-elle par éliminer la première ?